Charles d’Orléans, Guillaume Apollinaire et Jacques Prévert : Poèmes d’hiver

Dans 3 jours c’est l’hiver. A cette occasion, Alalettre est heureux de vous proposer ces 3 poèmes :

Claude Monet, La charrette. Route sous la neige à Honfleur (détail), vers 1867, Musée d’Orsay, Paris,

 

 Le temps a laissé son manteau de Charles d’Orléans

 Le temps a laissé son manteau
De vent, de froidure et de pluie,
Et s’est vêtu de broderie,
De soleil luisant, clair et beau.

Il n’y a bête ni oiseau
Qu’en son jargon ne chante ou crie :
Le temps a laissé son manteau
De vent, de froidure et de pluie.

Rivière, fontaine et ruisseau
Portent en livrée jolie,
Gouttes d’argent d’orfèvrerie ;
Chacun s’habille de nouveau :
Le temps a laissé son manteau.

Les Sapins de Guillaume Apollinaire

Les sapins en bonnets pointus
De longues robes revêtus
Comme des astrologues
Saluent leurs frères abattus
Les bateaux qui sur le Rhin voguent

Dans les sept arts endoctrinés
Par les vieux sapins leurs aînés
Qui sont de grands poètes
Ils se savent prédestinés
À briller plus que des planètes

À briller doucement changés
En étoiles et enneigés
Aux Noëls bienheureuses
Fêtes des sapins ensongés
Aux longues branches langoureuses

Les sapins beaux musiciens
Chantent des noëls anciens
Au vent des soirs d’automne
Ou bien graves magiciens
Incantent le ciel quand il tonne

Des rangées de blancs chérubins
Remplacent l’hiver les sapins
Et balancent leurs ailes
L’été ce sont de grands rabbins
Ou bien de vieilles demoiselles

Sapins médecins divagants
Ils vont offrant leurs bons onguents
Quand la montagne accouche
De temps en temps sous l’ouragan
Un vieux sapin geint et se couche.

Chanson pour les enfants l’hiver de Jacques Prévert

Dans la nuit de l’hiver galope un grand homme blanc.
C’est un bonhomme de neige avec une pipe en bois,
un grand bonhomme de neige poursuivi par le froid.

Il arrive au village.
Voyant de la lumière,
le voilà rassuré.

Dans une petite maison, il entre sans frapper
et pour se réchauffer
s’assoit sur le poêle rouge
et d’un coup disparaît,
ne laissant que sa pipe au milieu d’une flaque d’eau,
ne laissant que sa pipe et puis son vieux chapeau…

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