La Chartreuse de Parme de Stendhal

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Contexte

C’est le 3 septembre 1838 que Stendhal a l’idée d’écrire la Chartreuse de Parme. Pendant 2 mois, il garde le silence, préférant se consacrer à la rédaction des Mémoires d’un touriste. Puis, le 4 Novembre, Stendhal s’installe au 4 Rue Caumartin à Paris. Pendant 7 semaines, il se met au travail et dicte à un secrétaire le texte de la Chartreuse. Le 26 décembre, il remet à son éditeur un texte de plus de cinq cent pages.

La Chartreuse de Parme est publié en deux volumes en mars 1839. Un extrait du roman, notamment la bataille de Waterloo a été publié en avant-première dans Le Constitutionnel. Balzac envoie alors une lettre de félicitations à Stendhal.

La Chartreuse de Parme ne recevra que peu d’échos et d’éloges dans la presse. Balzac, toujours lui, publiera en septembre 1840 un très long article élogieux sur ce roman : »M. Beyle a fait un livre où le sublime éclate de chapitre en chapitre.  » Il émet également quelques réserves et donne plusieurs conseils à Stendhal. Malgré les quelques critiques, Stendhal est flatté de l’intérêt que lui porte le père de la Comédie humaine. Il commencera même à apporter des modifications au texte à la Chartreuse , allant dans le sens souhaité par Balzac. Mais La Chartreuse de Parme ne connaîtra pas de réédition du temps du vivant de Stendhal, celui-ci mourant dès 1842. Ces corrections ont été le plus souvent reprises en notes, car si parfois elles corrigent une obscurité, « le plus souvent elles alourdissent le trait, et confirment que l’art de Stendhal est fait d’abord de liberté et de spontanéité ».

La version que nous lisons aujourd’hui est donc toujours la version de 1839.

Résumé du roman

Livre 1

15 mai 1796. Bonaparte et son armée entrent en libérateur dans Milan, jusqu’alors possession autrichienne. La ville accueille les français avec enthousiasme. Parmi les soldats se trouve le lieutenant Robert. Il loge dans le château du marquis del Dongo, et charme le cœur de la Marquise. Un an plus tard, naît Fabrice del Dongo.

Le Marquis del Dongo qui éprouve une grande haine pour les français doit se réfugier avec sa famille dans son château de Grianta, au bord du lac de Côme. Malgré un père et un frère aîné bourrus, Fabrice vit une enfance insouciante et joyeuse au château. Il passe ses journées à la chasse et se promène en barque sur le lac. L’abbé Blanès, curé de Grianta, lui enseigne le latin. Il transmet également au jeune Fabrice sa passion pour l’astrologie et « une confiance illimitée dans les signes. »

En 1814, Gina, la sœur du marquis, devenue veuve du comte de Pietranera, vient s’installer à Grianta. Elle a trente ans, elle est belle et retrouve au Château  » son cœur de seize ans ». Elle se livre avec Fabrice et sa mère à de folles équipées nocturnes sur le lac de Côme. Grâce à la présence enjouée de la Comtesse, et malgré la mélancolie sombre que le marquis et son fils aîné dispensent autour d’eux, la joie revient au château.

En mars 1815, Napoléon de retour de l’île d’Elbe débarque dans le sud de la France. L’apparition d’un aigle dans le ciel est interprété par Fabrice comme un signe. Il souhaite rejoindre l’empereur et l’armée qu’il vient de reconstituer. Adieux émouvants à Grianta. Arrivé en France, Fabrice est pris pour un espion, et arrêté. Sa beauté et son jeune âge attendrissent la geôlière qui, après quelques semaines, l’aide à s’évader. Il se procure un cheval et part au combat au galop . Fabrice se retrouve à Waterloo, il se lance avec ferveur dans la bataille.

A Waterloo, Fabrice rencontre une cantinière. Emue par « ce beau jeune homme », elle le prend sous sa protection et lui prodigue de précieux conseils. Le spectacle d’un cadavre défiguré fait pâlir d’horreur Fabrice, mais le bruit du canon réjouit son cœur. Il parvient à se glisser parmi un groupe de hussards et participe à l’escorte de plusieurs généraux et du Maréchal Ney. Pour obtenir la sympathie des hussards, Fabrice leur offre de l’eau de vie. Pour avoir top bu de cet alcool, il ne peut reconnaître l’empereur qui passe sous ses yeux. L’escorte à laquelle il appartient accompagne maintenant le général Comte d’A .. qui n’est autre que le lieutenant Robert. Ses camarades le dépossèdent alors de son cheval pour le fournir au général Comte d’A… qui vient d’être renversé avec sa monture. Abandonné sur le champ de bataille et désespéré :  » il défaisait un à un tous ses beaux rêves d’amitié chevaleresque. » Fabrice retrouve « sa  » cantinière du matin qui l’accueille dans sa voiture. Epuisé, Fabrice s’endort profondément.

A son réveil, Fabrice est pressé de se battre. Il suit un caporal et tue, tout joyeux, son premier ennemi. Autour de lui, c’est la débâcle . Malgré les recommandations de la cantinière qui lui conseille de fuir, Fabrice bataille contre des hussards insoumis. Son sens de l’honneur lui vaut d’être blessé.

Fabrice trouve refuge dans une auberge, où il a la chance d’être soigné par la maîtresse de maison et par ses filles. Il a une tendre idylle avec Aniken, l’une des filles. Convalescent, il quitte l’auberge et regagne Paris. Il prend possession de plusieurs lettres de sa mère et de sa tante qui le pressent de rentrer.

Sur le chemin du retour, il apprend qu’il a été dénoncé comme espion par son frère Ascagne et doit faire preuve d’une extrême prudence. Il arrive de nuit et rentre en cachette au château . Attendu par sa mère et sa tante, il est accueilli par des « transports de tendresse ».

Tous trois décident de partir à Milan . Ils sont alors arrêtés sur la route par des gendarmes . Mais il s’agit d’un malentendu, les forces de l’ordre sont à la recherche du général libéral Fabio Conti. Celui-ci est alors arrêté en compagnie de sa fille Clélia, une enfant de douze ans dont la beauté singulière touche Fabrice. La comtesse Gina joue de sa séduction et de son prestige et parvient à faire libérer tout le monde.

La Comtesse Gina éprouve pour son neveu des sentiments qui ressemblent à de l’amour : « S’il eut parlé d’amour, elle l’eût aimé ; n’avait-elle pas déjà pour sa conduite et sa personne une admiration passionnée ?…« 

Afin d’échapper à la police autrichienne , Fabrice se réfugie temporairement dans le Piémont. La Comtesse Gina qui du fait de l’absence de Fabrice s’ennuie à Grianta retourne à Milan. A la Scala, on lui présente le Comte Mosca, un homme d’esprit qui est Ministre du duché de Parme. Il évoque avec humour les petits secrets de la Cour de Parme. La Comtesse est ravie, le Comte, lui, tombe amoureux. Il propose à Gina de l’accompagner à Parme. Là, il va lui arranger un mariage . Il lui conseille d’épouser le vieux duc Sanseverina, elle pourra disposer de sa fortune, de son palais, et devenir en toute liberté sa maîtresse . En échange il promet au vieux duc une Ambassade.

Gina est présentée à la cour du duché de Parme . Elle impressionne favorablement le prince. Le comte Mosca devient premier Ministre et décide de prendre en main la carrière de Fabrice : qu’il fasse trois années de théologie à Naples, il se charge ensuite de le faire évêque, puis Archevêque de Parme.

Ses études terminées, Fabrice revient métamorphosé de Naples. Il est désormais Monsignore. Sa tante Gina, la nouvelle Duchesse Sanseverina, est plus que jamais séduite par le charme de ce brillant Monsignore. L’intimité entre Gina et Fabrice irrite le Prince qui se venge en adressant une lettre anonyme à son premier Ministre. Dans ce courrier il indique au Comte Mosca que Fabrice est son rival. Mosca connaît les affres de la jalousie . Fabrice, quant à lui, est gêné des sentiments passionnés qu’éprouve sa tante à son égard. Cette situation ambiguë lui ôte sa gaieté.

Au grand soulagement de Mosca, Fabrice courtise une jeune actrice du nom de Marietta; ce qui provoque la colère de son amant , l’acteur Giletti . Ce dernier menace de tuer Fabrice. Heureusement le comte Mosca veille et conseille à Fabrice de s’éloigner quelque temps. Fabrice retourne à Grianta et décide de rendre visite à l’abbé Blanès. Le vieux curé l’accueille avec une tendresse paternelle.

Dans le clocher de l’église, Fabrice écoute avec émotion les conseils et les prédictions du vieil abbé. Puis le lendemain, il reste caché toute la journée dans le clocher et admire le pays de son enfance : le château de son père, le village, le lac … il songe à son enfance et passe une journée de rêverie délicieuse. Le soir, il quitte l’abbé Blanès en l’embrassant une dernière fois et avant de se rendre sur les bords du Lac majeur pour se mettre à l’abri, il fait un détour jusqu’à son « marronnier » ; l’arbre que sa mère a planté l’année de sa naissance.

Fabrice se décide à rentrer à Parme. Il dérobe un cheval à un valet et lui lance en échange une poignée de monnaie. Arrivé à Parme, le cœur empli de joie, il se rend chez sa tante Gina; elle vient de perdre son mari et a hérité du palais de Sanseverina. Fabrice amuse le comte Mosca et la duchesse en leur racontant ses aventures. Le Comte fait prendre conscience à Fabrice qu’il a commis des imprudences qui auraient pu lui valoir la prison, ce qui aurait ruiné définitivement sa carrière ecclésiastique.

Fabrice rend ensuite une visite de courtoisie à l’archevêque. Puis il se précipite chez Marietta , mais ne peut la voir. Il quitte alors Parme. Le hasard veut qu’il croise sur son chemin Giletti, l’amant de Marietta. Celui-ci le provoque en duel. Fabrice tue son rival. Obligé de s’enfuir, il s’empare du passeport de son agresseur et se dirige vers la frontière. Le passage de la douane lui fait craindre le pire, mais la chance est avec lui, on le laisse passer. Dans une auberge, il rencontre Ludovic, l’un des cochers de sa tante Gina. Ce dernier aide Fabrice à soigner les blessures qu’il a contractées lors de son duel, fait disparaître ses vêtements tachés de sang et lui en prête d’autres. Il cache Fabrice au bord du Pô et fait transmettre à la duchesse Sanseverina un courrier que son neveu lui a confié. Fabrice se rend alors en barque à Ferrare.

Sur les conseils du médecin qui le soigne à Ferrare, Fabrice fuit la ville et se rend avec Ludovic à Bologne. Il se rend alors dans une église et se recueille. Il remercie également « Dieu avec effusion de la protection évidente » dont il bénéficie. Un des valets de sa tante Gina a été envoyé à sa rencontre. Il lui apporte de faux passeports , en échange Fabrice lui transmet des courriers à destination de sa tante et de l’Archevêque. Ce dernier lui répond et lui fait part de l’énorme scandale qu’a provoqué son duel . Tout Parme l’accuse du meurtre de Giletti, l’amant de Marietta , d’autant que la marquise Raversi, l’ennemie du comte Mosca et de la duchesse, tente de manipuler les témoins de ce duel.

A Bologne, Fabrice retrouve Marietta. Il connaît alors auprès de la jeune fille « une joie et une sécurité profondes » , un sentiment qu’il assimile à de l’amour. Mais entraîné par « une pique de vanité » , il est amené à courtiser la Fausta, l’une des grandes chanteuses italiennes de l’époque. Il vit une aventure rocambolesque, mais l’amant de la Fausta, vexé et jaloux, se venge et lui fait subir une douloureuse humiliation. Fabrice finit par provoquer son rival en duel et le blesse grièvement. Il se réfugie ensuite à Florence où il reçoit des lettres de reproches de sa tante. Cette dernière , lorsqu’elle apprend que l’amour et la passion sont absents de cette étonnante aventure, lui pardonne volontiers.

Livre 2

Un peu plus d’une année a passé depuis la mort de Giletti… La Marquise Raversi et le ministre de la Justice Rassi, ennemis jurés du Comte Mosca et de La Sanseverina, complotent pour faire condamner Fabrice. Ayant eu vent de ce complot, la duchesse Sanseverina menace le prince de quitter la Cour de Parme s’il ne renonce pas à toute poursuite contre son neveu. Le prince est ulcéré de la démarche de la Sanseverina , mais il ne souhaite pas que cette femme superbe quitte la cour. La duchesse obtient donc que le prince s’engage par écrit. Mais le Comte Mosca, présent lors de l’entrevue, va, par esprit courtisan envers le prince, modifier le texte, afin de ménager l’amour propre de son souverain. Rassuré par la promesse qu’a acquise sa tante, Fabrice rentre à Parme. Hélas pour lui , le prince est vexé de cette signature forcéequ’a réussi à lui extorquer Gina et décide de se venger . A l’insu du comte Mosca, il ordonne que l’on arrête Fabrice et signe un document le condamnant à douze ans de forteresse.

Fabrice est arrêté et emmené à la citadelle de Parme. Le gouverneur de cette forteresse est le général Fabio Conti, que Fabrice avait croisé, avec sa fille Clélia, sept années plus tôt lorsqu’il se rendait à Milan en compagnie de sa tante Gina. La jeune Clélia a grandi et est devenue « sublime ». L’effervescence qui marque l’arrivée du prisonnier attire l’attention de Clélia, surprise de retrouver Fabrice del Dongo dans cette citadelle. Leurs regards se croisent. Fabrice , immédiatement séduit, la salue et évoque leur première rencontre :  » il me semble, mademoiselle, lui dit-il, qu’autrefois près d’un lac , j’ai déjà eu l’honneur de vous rencontrer… ». Clélia est trop émue et « ne trouve aucune parole pour répondre ». Le soir même lors d’une réception, la duchesse Sanseverina est intriguée par l’attitude inhabituelle de Clélia. De même Clélia est témoin de la douleur qu’éprouve la duchesse lorsqu’elle apprend l’arrestation de son neveu.

La duchesse est désespérée. Elle éprouve de la rancune contre le comte Mosca, qui par esprit courtisan, a permis l’arrestation de Fabrice. Elle exprime aussi sa colère et sa haine envers le prince qui l’a trompée. Elle refuse ensuite plusieurs fois de recevoir le Comte Mosca . Lorsqu’enfin elle accepte de le voir, celui-ci la trouve vieillie. Il se déclare prêt à faire une folie pour ne pas la perdre : il est prêt à tout tenter pour faire évader Fabrice.

Le Comte Mosca reçoit son tout puissant ministre de la justice Rassi et lui exprime ironiquement sa surprise de la décision qui a été prise, à son insu, d’emprisonner Fabrice. Mosca essaye de s’assurer le soutien de Rassi en lui promettant de le faire anoblir. Ce dernier semble accepter. Le Comte Mosca souhaite en informer la duchesse, mais la porte du palais Sanseverina reste fermée. De son côté la duchesse essaye de corrompre les gardes de la citadelle pour qu’ils le laissent s’échapper Fabrice, mais en vain. Les rumeurs les plus extravagantes se répandent dans Parme : on dit que la duchesse a un nouvel amant et que le Comte va démissionner. On dit aussi que Fabrice risque d’être bientôt exécuté…

Fabrice est emprisonné dans cette citadelle de deux cent dix pieds de haut . Une joie incompréhensible s’empare de lui : il admire la vue sublime sur les Alpes et découvre en contre bas la volière de Clélia. Sa patience est récompensée , car il peut l’apercevoir lorsqu’elle vient soigner ses oiseaux. Un abat-jour est installé à sa fenêtre, mais Fabrice le perce pour pouvoir continuer à admirer Clélia. Il adresse à la jeune fille des signes, mais Clélia se refuse d’y répondre.

Le gouverneur a hâte de marier sa fille . Il souhaite qu’elle épouse le marquis Crescenzi, l’un des plus beaux partis de la cour de Parme. Si elle refuse, le gouverneur est prêt à l’enfermer au couvent. Clélia ne se fait guère d’illusion sur Fabrice , qu’elle sait volage et qu’elle prend pour « un libertin ». Elle sait aussi qu’il est promis à une carrière ecclésiastique. La menace du couvent que brandit son père lui fait prendre conscience de ses sentiments pour Fabrice : « Quoi, je ne le verrai plus. » Pour rester avec Fabrice, elle accepte donc contrainte et forcée , d’obéir à son père, d’autant qu’elle a appris qu’on menaçait de l’empoisonner. Elle lui demande de ne pas manger d’autre nourriture que celle qu’elle lui fera parvenir. A l’aide d’un alphabet de fortune dessiné avec un morceau de charbon, et de quelques airs d’opéra, Fabrice et Clélia réussissent à établir une correspondance amoureuse .

Une nuit, alors qu’il contemple les étoiles, Fabrice aperçoit des signaux lumineux . Il parvient à déchiffrer un message de sa tante Gina, qui depuis plusieurs mois essaie d’entrer en contact avec lui. Elle lui demande de se tenir prêt à s’évader. Par amour pour Clélia, Fabrice refuse et lui confie sa décision . La fille du gouverneur renonce à toute prudence et va jusqu’à se compromettre en sollicitant la complicité d’un geôlier. Sachant Fabrice en danger de mort, elle lui demande lors d’une entrevue secrète, d’obéir à sa tante, menaçant dans le cas contraire de se réfugier immédiatement dans un couvent : « et je vous jure que de la vie, je ne vous adresserai la parole. » Clélia conjugue ses efforts avec ceux de Gina afin de favoriser l’évasion de Fabrice. Cette dernière parvient à jeter dans la chambre du prisonnier un courrier précisant les détails de l’évasion. Au même moment le prince et son ministre Rassi étudient comment ils pourraient empoisonner Fabrice. Le Comte Mosca est informé, directement par Rassi, du danger de mort que court Fabrice del Dongo.

Et l’on apprend qu’un an plus tôt la duchesse Sanseverina rencontrait, dans sa propriété de Sacca, le poète Ferrante Palla. Ce dernier,  » jeune et fort bel homme » est l’un des plus grands poètes de son époque; il est aussi républicain, farouche adversaire du Prince, et éperdument amoureux de la duchesse. Après l’arrestation de Fabrice, il assure à la Sanseverina qu’il est prêt à tout pour sauver son neveu. La duchesse a décidé d’empoisonner le Prince, elle demande à Ferrante Palla de ne commettre cet assassinat que lorsqu’elle lui en donnera l’ordre. C’est également le poète qui imagine et organise l’évasion de Fabrice. Après ce flash-back, le récit reprend son cours normal. Lors du mariage de la sœur du Marquis Crescenzi, celui-là même que le Gouverneur destine à sa fille Clélia, la duchesse remet à la fille du gouverneur les cordes devant servir à l’évasion de Fabrice. La duchesse en profite également pour neutraliser le gouverneur en lui administrant un puissant somnifère. Clélia prend peur, elle est persuadée que son père a été empoisonné et qu’elle est la complice de ce crime. Elle fait le vœu à la Madonne de ne plus revoir Fabrice et d’épouser le Marquis Crescenzi, si son père est sauvé .

Grâce aux cordes fournies par Gina et introduites dans la forteresse par Clélia, Fabrice va pouvoir s’échapper. La nuit choisie, à minuit, alors qu’un épais brouillard recouvre la citadelle, Fabrice se signe, puis se lance dans le vide. Il réussit à descendre la terrible tour Farnèse . Il a les mains en sang et est recueilli au bas de la Tour par sa tante et ses hommes de main. Gina donne alors le signal pour que Ferrante Palla empoisonne le prince. Fabrice se réfugie avec sa tante sur les bords du lac de Côme. Il a la nostalgie de la prison et de ses conversations secrètes avec Clélia. La duchesse est désespérée . Quant à Clélia elle ne se pardonne pas d’avoir trahi son père et est rongée par le remords. Elle accepte d’épouser le Marquis Crescenzi

La duchesse donne une fête inoubliable à Sacca pour célébrer l’évasion de Fabrice. Mais celui-ci est mélancolique, car il apprend que l’on s’affaire pour la préparation du mariage de Clélia et du marquis Crescenzi. La mort du prince crée une grande agitation dans le duché de Parme, mais le Comte Mosca reprend vite la situation en main. C’est le fils du prince assassiné qui lui succède. Il est ébloui par la duchesse . Il la rappelle à Parme et lui présente ses hommages.

Le Comte Mosca essaye également de trouver un moyen d’innocenter définitivement Fabrice, qui bien que libre est toujours sous le coup d’une condamnation. Il faudra que le neveu de la Sanseverina soit à nouveau jugé et reconnu innocent pour être totalement réhabilité. Mosca conseille aussi à la Duchesse de jouer de son influence auprès du nouveau prince. La duchesse accepte alors de devenir la confidente de la Princesse. Pour rentrer à Parme, Fabrice se déguise en marchand de marrons et afin d’être plus près de Clélia, se cache en face de la citadelle.

Très rapidement la Sanseverina devient « l’âme de la cour » : elle organise de splendides soirées où tout le duché se précipite. On y improvise des comédies et le prince en personne y tient le rôle du soupirant de la duchesse. Mais pendant ce temps là, Rassi et sa police mènent leur enquête pour découvrir les assassins du Prince. Alors qu’ils viennent de déposer sur son bureau, un dossier complet de l’enquête, le nouveau souverain demande à la duchesse conseil sur la conduite à tenir. La Sanseverina réussit à convaincre le prince de brûler tous ces documents compromettants. Elle demande également au prince de faire juger à nouveau Fabrice, le comte Mosca ayant trouvé des témoins du duel entre Giletti et son neveu. Leurs témoignages innocentent Fabrice. Confiant, ce dernier se constitue prisonnier. Le gouverneur Fabio Conti savoure ce retournement de situation. Il est bien décidé à se venger.

Clélia est troublée par le retour en prison de Fabrice. Fidèle à son vœu de ne plus le revoir, elle se cache. Elle apprend pourtant que de lourdes menaces d’empoisonnement pèsent sur lui et qu’il risque de ne pas sortir vivant de la prison. Craignant pour sa vie, elle gravit les marches de la tour, bouscule les geôliers et se précipite dans sa chambre. Elle parvient juste à temps, à l’empêcher de toucher au repas fatal qui est sur sa table. La duchesse Sanseverina ayant elle aussi appris que la vie de Fabrice est menacée est prête à tout pour sauver son neveu. Elle jure au prince qu’elle sacrifiera son honneur de femme et se donnera à lui si Fabrice sort sain et sauf de la citadelle. En toute hâte , l’aide de camp du prince est dépêché à la prison et libère Fabrice. La duchesse accourue au pied de la citadelle voit son neveu sortir sain et sauf. Une enquête est menée dans la citadelle qui montre que le repas du prisonnier était réellement empoisonné. Le gouverneur est aussitôt destitué et exilé jusqu’au mariage de sa fille. Fabrice est à nouveau jugé et cette fois il est acquitté. Il est nommé coadjuteur de l’archevêque de Parme. Mais ces honneurs le laissent de marbre, il souhaite simplement revoir Clélia.

Fabrice est inconsolable. Il parvient à louer un appartement face au palais où demeure Clélia . Celle-ci est malheureuse de ne pouvoir revoir Fabrice , mais reste fidèle au vœu qu’elle a fait à la Madonne. Fabrice , en se déguisant, parvient cependant à s’approcher d’elle dans l’obscurité. Elle lui indique qu’elle se résigne à épouser le Marquis Crescenzi, seul moyen de sauver son père de l’exil. Fabrice décide de se retirer dans un petit appartement , ce qui lui vaut à Parme une « immense réputation de sainteté ». Il reste cloîtré de longs mois et ne quitte cette retraite que pour assister à l’anniversaire de la princesse. Il ne peut contenir ses larmes lorsqu’il y croise Clélia. Cette dernière est bouleversée de constater combien le chagrin a modifié sa physionomie. Mais en même temps, elle réalise que Fabrice ne l’a pas oublié, ce qui la comble de joie.

Gina fait savoir au prince que s’il souhaite qu’elle se donne à lui, comme elle s’y était engagée pour sauver la vie de Fabrice, elle quittera définitivement le duché de Parme. Le prince ne peut résister à la beauté de la duchesse. Son sacrifice accompli, la Sanseverina quitte la principauté .Elle épouse le comte Mosca et les époux partent pour Naples. Clélia torturée par le remords reste enfermée dans son palais. Sur les conseils de sa tante , Fabrice se met à prêcher. Ses sermons connaissent un immense succès et toutes les femmes de Parme se précipitent , éblouies par son éloquence. Parmi elles, la jeune Anetta Marini déclare ouvertement son amour au jeune prélat. Clélia est impatiente de connaître cette Anetta dont toute la ville parle.

Il se murmure dans les salons Crescenzi que Fabrice est tombé amoureux d’Anetta Marini. Cette rumeur décide Clélia à aller écouter les sermons du prédicateur. Le lendemain, Fabrice reçoit un billet de Clélia qui l’invite à un rendez-vous.  » Fabrice tomba à genoux et fondit en larmes : « enfin s’écria-t-il, après quatorze mois et huit jours ! Adieu les prédications. » C’est le début d’une liaison secrète entre Fabrice et Clélia qui va durer 3 ans . Pendant ce temps l’archevêque meurt et Fabrice lui succéde. « Après ces trois années de bonheur divin, l’âme de Fabrice eut un caprice de tendresse ». Puisqu’il ne peut voir, durant le jour, Clélia, Fabrice exige d’avoir près de lui le petit Sandrino, le fils né de leur liaison  et secrète. Les amants imaginent un stratagème qui consiste à simuler une maladie de l’enfant et annoncer sa mort pendant l’absence du marquis. Mais Sandrino tombe réellement malade et meurt quelques mois après son enlèvement. Cette mort apparaît à Clélia comme une punition du ciel.  » Elle ne survécut que de quelques mois à ce fils chéri ». A la mort de Clélia , Fabrice vend tous ses biens et se retire à la Chartreuse de Parme . Il y meurt un an après. « La duchesse ne survécut que fort peu de temps, à Fabrice, qu’elle adorait« . Le duché de Parme connut grâce à son jeune prince « une ère de liberté », et le Comte Mosca devint immensément riche…

Laura Jacquemelle

Jugements critiques de Balzac,  Barbey d’Aurevilly, Zola, Léautaud, Gide …

« M. Beyle a écrit un livre où le sublime éclate de chapitre en chapitre . Il a produit , à l’âge où les hommes trouvent rarement des sujets grandioses et après avoir écrit une vingtaine de volumes extrêmement spirituels, une œuvre qui ne peut-être appréciée que par les âmes et par les gens vraiment supérieurs. Enfin il a écrit Le prince moderne, le roman que Machiavel écrirait, s’il vivait banni de l’Italie au XIXème siècle.

Aussi, le plus grand obstacle au renom mérité de M. Beyle vient-il de ce que la Chartreuse de Parme , ne peut trouver de lecteurs habiles à la goûter que parmi les diplomates, les ministres , les observateurs, les gens du monde les plus éminents, les artistes les plus distingués, enfin, parmi les douze ou quinze cents personnes qui sont la tête de l’Europe. Ne soyez donc pas étonnés que, depuis dix mois que cette œuvre surprenante a été publiée , il n’y ait pas un seul journaliste qui l’ait ni lue, ni comprise , ni étudiée, qui l’ait annoncée , analysée et louée , qui même y ait fait allusion. Moi, qui crois m’y connaître un peu, je l’ai lue pour la troisième fois , ces jours-ci : j’ai trouvé l’oeuvre encore plus belle, et j’ai senti dans mon âme l’espèce de bonheur que cause une bonne action à faire.

N’est ce pas faire une bonne action , que d’essayer de rendre justice à un homme d’un talent immense , qui n’aura de génie qu’aux yeux de quelques êtres privilégiés, et à qui la transcendance de ses idées ôte cette immédiate mais passagère popularité que recherchent les courtisans du peuple et que méprisent les grandes âmes ? … »

Balzac,
extrait de l’article de 72 pages
qu’il a publié le 25 septembre 1840
dans la Revue parisienne

« Beyle, un scélérat d’idées, je le sais, mais l’écrivain qui a pensé avec tant de vigueur Le Rouge et le Noir et la Chartreuse de Parme, cet homme qui, avec sa noirceur et ses perversités, brille d’une lueur sombre et dure au premier rang des puissances littéraires de son temps. »

Jules Barbey d’Aurevilly, Le Pays, 11 mai 1855

« Notre plus grand romancier, Stendhal, étudiait les hommes comme des insectes étranges, qui vivent et meurent, poussés par des forces fatales; son seul souci était de déterminer la nature, l’énergie, la direction de ces forces; son humanité ne sympathisait pas avec celle de ses héros, il restait supérieur à leur misère et à leur folie, il se contentait de faire son travail de dissection, exposant simplement les résultats de ce travail. L’œuvre du romancier doit cesser où commence celle du moraliste. »

Emile Zola, causeries dramatiques, 1881

« Pas une ligne pour le joli, pour le pittoresque, pour l’amusement. Toujours quelques chose, toujours de l’intérêt. »

Paul Léautaud, Journal Littéraire, 1905

« Le Grand secret de Stendhal, sa grande malice, c’est décrire tout de suite… De là, ce quelque chose d’alerte et de primesautier, de disconvenu, de subit et de nu qui nous ravit toujours à neuf dan son style. On dirait que sa pensée ne prend pas la peine de se chausser pour courir. »

André Gide, Journal, 3 septembre 1937

« Cet homme que j’aime si peu et dont je ne puis ouvrir un livre que je n’en dévore aussitôt quelques pages, comme il me déplaît et comme je l’admire. »

Julien Green, Journal, 1948