Georges Schéhadé (1905-1989)

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«Il y a des jardins qui n’ont plus de pays
Et qui sont seuls avec l’eau
Des colombes les traversent bleues et sans nids
Mais la lune est un cristal de bonheur
Et l’enfant se souvient d’un grand desordre clair.»
Georges Schéhadé

Georges Schéhadé issu d’une vielle famille de la bourgeoisie libanaise naît le 2 novembre 1905 à Alexandrie. Mieux compris à Paris, il regrettait Beyrouth d’où il regrettait Paris. Mais c’est à Paris qu’il fait ses classes poètiques avec Etincelles puis ses premiers poèmes dans la revue Commerce dirigée par Valéry, Fargue et Larbaud ! Ses vers plaisent à Eluard qui le présente au groupe surréaliste.

Il trouve un second mode d’expression pendant la seconde guerre mondiale : l’écriture dramatique.

Premier lauréat du Prix de la Francophonie en 1986 par l’Académie française, Georges Schéhadé scellé l’alliance dde l’Orient et de l’Occident. Il décèdera à Paris le 17 janvier 1989.

Georges Schehadé se laisse découvrir, depuis l’enfance jusqu’à la vieillesse, à travers sept chapitres. Le nombre de manuscrits inédits (pièces de théâtre, poèmes de jeunesse, correspondance et critiques d’art) est impressionnant, pour la plus grande joie de ceux qui pratiquent Schehadé. À commencer par les écrits de jeunesse dans Essor, la revue du Collège du Sacré-Cur où il a étudié, et Le père Eusèbe, une comédie en un acte, rédigée alors qu’il avait 15 ou 16 ans. Après D’Alexandrie à Beyrouth, 1905-1923, suit J’entrai à mon insu dans l’art, 1923-1930 où, entre les éditions originales d’ Étincelles, de Rodogune Sinne et de L’Écolier Sultan, se détache le manuscrit, jamais publié, de La Chevelure de Bérénice, recueil de poèmes écrit entre 1924 et 1926 et dédié au poète Michel Chiha.

Derrière les grands paradis,

1930-1944 annonce le début d’une carrière qui ne cessera d’être glorieuse. Cette période est, entre autres, celle de la rédaction de Chagrin d’amour, première pièce jouée de Schehadé, commandée par l’épouse du commandant des Troupes du Levant, en 1938.

Poète Schehadé

1944-54 assure sa notoriété en tant que poète, salué par les surréalistes, et la cinquième étape, La poursuite des fables,

1954-1960, le consacre dramaturge et même cinéaste. Une anecdote amusante relevée dans un entrefilet de L’Orient : le 15 décembre 1956, Georges Schehadé, qui n’avait pas ses papiers sur lui, est conduit au poste de police où il passe la nuit.

La critique artistique. En 1966, il est décoré par le président-poète du Sénégal, Léopold SedarSenghor. Quand tu quitteras le pays des lampes, 1975-1989 : la dernière partie de la vie du poète est marquée par la guerre et l’exil à Paris. Sont présentés, auprès d’autres documents et manuscrits de la fin de sa vie, des entretiens accordés au Nouvel Observateur où Schehadé parle avec un immense amour du Liban, mais aussi, détail émouvant, un des livres de sa bibliothèque beyrouthine traversé d’une balle.

Schehadé par lui-même

Georges Schehadé le discret se raconte, selon le vu des auteurs, qui ont pris cette décision en découvrant l’impressionnante correspondance du poète avec Laurice Schehadé-Benzoni, sa sur aînée. A cette destinataire privilégiée, il confie ses tourments de poète, ses déboires avec les éditeurs, ses attentes et ses espoirs. Mais il y a aussi la correspondance fournie avec ses amis de jeunesse : Antoine Tabet, Henri El Kayem, Marthe Cazal, les articles, haineux ou élogieux, qui paraissent à Paris après la première de Monsieur Bo’ble, pièce qui fait scandale. Puis plus tard, la correspondance avec Jean-Louis Barrault, l’homme de théâtre qui montera régulièrement ses oeuvres.( Histoire de Vasco, les violettes, Le voyage, L’émigré de Brisbane )

Outre les écrits contemporains à l’auteur et à ses proches, cet ouvrage est systématiquement jalonné de précisions historiques et biographiques. Le lecteur entre donc de plain-pied dans la réalité quasi quotidienne de l’écrivain, et le suit pas à pas dans son évolution tant littéraire que personnelle : ainsi, on découvre un Schehadé amoureux, désespéré, orgueilleux, mais toujours et invariablement drôle.

La poésie de Schehadé a littéralement enchanté les écrivains de l’époque. Tous, ou presque, y ont succombé : leurs petits mots, leurs lettres ou leurs articles qu’ils lui destinent sont remplis d’admiration et de respect. Le plus touchant est que la majorité d’entre eux le «remercient» d’avoir écrit

De la part d’un auteur aussi discret, répugnant à échafauder des théories, on attend tout de même des révélations fracassantes. Les quelques entretiens qui traversent le catalogue ne révèlent qu’une chose : Schehadé ne savait pas, et voulait encore moins, parler de poésie. Alors les plus grands critiques littéraires, comme Gabriel Bounoure ou Gaëtan Picon, ont tenté de l’expliquer. D’autres poètes, comme Adonis ou Saint-John Perse, lui ont rendu hommage, en prose ou en vers. Peut-être que le lecteur trouvera quelques pistes dans Interview avec soi-même, par Georges Schehadé, un texte inédit en français, rédigé pour le programme de la création d’ Histoire de Vasco à Berlin en 1957. Schehadé, dans ce dialogue en miroir, répond à son double qui lui demande comment il occupe son temps, en tant que secrétaire général de la faculté des lettres : «Je caresse les rayons de la bibliothèque de la faculté d’où j’ai banni les livres ­ par prudence».

Ses derniers écrits paraissent dans un volume rétrospectif : ce sont Les Poèsies Le portrait de Jules et le récit de l’An Zéro augmenté plus tard du Nageur d’un seul amour avec poèsies V

Certains thèmes reviennent dans la poésie de Georges Schehadé : Les enfants, le pays natal, la mère, les Mages et les symboles chrétiens… Ils semblent tous tourner autour de sa propre enfance, ou revenir à quelque chose ou quelqu’un qui l’a marqué dans sa jeunesse. Il semble que Schehadé n’eût jamais vraiment quitté son enfance, et qu’il continut à trouver son vocabulaire et ses thèmes dans ses rêves d’enfant, dans les jardins dont il se souvient ou qu’il construit, ou même dans le nom de sa mère. Chaque nouvelle rencontre avec une femme semble être la première rencontre, celle d’un adolescent avec la fille qu’il ne connaît pas et avec qui il explorera le monde dans l’espace d’une seconde.

Joel Kerdraon

Georges Schéhadé est l’auteur de :

Le Nageur d’un seul amour, 1985 (recueil poétique)

Une anthologie du vers unique, 1977 (recueil poétique)

L’habit fait le prince, 1973 (théâtre)

Les Poésies, Paris, 1969 (recueil poétique)

L’Emigré de Brisbane, 1965 (théâtre)

Le voyage, 1961 (théâtre)

Les Violettes, 1961 (théâtre)

Histoire de Vasco, 1956 (théâtre)

La Soirée des proverbes, 1954 (théâtre)

Les Poésies, 1952 (recueil poétique)

Monsieur Bob’le, 1951 (théâtre)

Si tu rencontres un ramier, 1951 (recueil poétique)

L’Ecolier Sultan, 1950 (recueil poétique)

Poésies III, 1949 (recueil poétique)

Poésies II, 1948 (recueil poétique)

Rodogune Sinne, 1947 (recueil poétique) .

Poésies I, 1938 (recueil poétique)

Oeuvres complètes, Ed. Dar An-Nahar

En savoir plus :

Georges Schéhadé sur le site de l’Imec

Georges Schéhadé sur France Culture