Nina Berberova (1901-1993)

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« Nina Berberova place en vous une minuscule fleur pliée qui mettra longtemps à s’épanouir en vous empoisonnant : voilà le prodige de cette technique littéraire, faite de constants paradoxes, de tendresse acérée, d’affectueuse malveillance, d’opiniâtre découragement… Tout le livre passe comme un regard, mais, comme dit Char, « l’éclair me dure ».» Jacques Drillon, Le Nouvel Observateur, 10 novembre 1988

Nina Berberova est née à Saint-Pétersbourg en 1901. Elle reçut à la naissance, comme un cadeau du destin, le privilège d’avoir deux origines, l’une nordique et russe, l’autre méridionale et arménienne.

Dès son enfance Nina écrivait des poèmes. Sa dernière année au lycée fut marquée par des événements majeurs : la révolution d’octobre, la paix de Brest-Litovsk avec l’Allemagne. Le peuple entra dans l’histoire en balayant tout sur son passage, eux les premiers. Nina Berberova écrit  »  Je connus les tourments que m’inspiraient les inégalités sociales, la politique qui envahissait notre vie et les premières privations. J’ai découvert, par-delà notre appartement vaste et propre où l’on vivait encore heureux, l’enfer de la pauvreté que l’on m’avait longtemps caché. Je ne connaissais les pauvres qu’à travers mes lectures. « 

A propos de cette époque elle écrit encore  » En 1912 et 1916, tout croulait, s’effilochait sous nos yeux comme un vieil habit usé. La contestation était l’air que nous respirions, elle a nourri mes premières vraies émotions. Beaucoup plus tard seulement, à l’âge de 25 ans environ, j’ai su que j’appartenais de par ma naissance à la bourgeoisie. Je ne me sens absolument pas liée à elle, notamment parce que j’ai passé ma vie entière parmi des exilés déclassés comme les héros de mes romans et de mes nouvelles. C’est de l’intelligentsia, déclassée ou non, que je me sens la plus proche. « 

Elle dit  » Les malheurs de mon siècle m’ont plutôt servi : la révolution m’a libérée, l’exil m’a trempée, la guerre m’a projetée dans un autre monde « 

Au cours de l’été 1922 ce fut l’expulsion massive de l’intelligentsia, le début des répressions systématiques et la destruction de deux générations. En littérature c’était la fin du symbolisme, la montée du futurisme et, par le biais de ce dernier, la mainmise de la politique sur l’art.. Le poète Khodassevitch, qu’elle connut à cette époque l’aida à s’exiler.

Khodassevitch et Nina partirent pour Prague. A l’automne 1924 ils rejoignirent Gorki à Sorrente où il séjournèrent quelques temps avant de s’installer à Paris. Leur vie parisienne ne fut pas facile. Avec leurs passeports d’ « apatrides  » ils n’avaient pas le droit de travailler comme salariés, ni comme ouvriers.

Berberova va vivre cette existence dans l’indigence matérielle et le luxe intellectuel. A Billancourt elle rencontre le petit peuple russe de l’immigration, aggloméré autour des usines Renault. Et en même temps, avec ces personnages pathétiques ou dérisoires, dépaysés par l’exil, elle découvre les thèmes que paraissait attendre son tempérament de narratrice. Elle entreprend aussitôt de composer de courts récits qui ne seront publiés en France que 68 ans plus tard sous le titre Chroniques de Billancourt.

Brisée par la guerre, lasse de l’indifférence française, n’en pouvant plus de sa vie d’émigrée crève la faim, Berberova en 1950, prend le bateau pour New York. L’Amérique lui fait plutôt bon accueil. Sept ans plus tard, la voici qui enseigne la littérature russe à Yale puis à Princeton, goûte aux plaisirs de l’automobile, sillonne les routes du Missouri.

….Pourtant son œuvre devra attendre encore pour être reconnue. C’est grâce à une traductrice, Lydia Chweitzer, et au flair d’un éditeur qu’en 1985 paraît en France un court roman «  l’Accompagnatrice « . Depuis, au rythme de un par an, les éditions Actes Sud publient ses récits composés dans les années 30 et 40. Tous ces romans ont pour protagonistes ces  » émigrés déclassés « . Des histoires faites  » de gloire, de misère, de folie et de boue « , écrit Nina Berberova à la fin de ses Mémoires.

Nina Berberova a écrit également : Le Laquai et la Putain,1986 – Astachev à Paris, 1988 – Le roseau révolté, 1988 – Le mal noir, 1989.

Rosanna Delpiano

Références bibliographiques :
« C’est moi qui souligne » de Nina Berberova, Editions Actes Sud.

Résumé et analyse de l’Accompagnatrice

Ce texte a été fourni par Rosanna Delpiano qui a rédigé une notice biographique de  Nina Berberova et une étude sur L’accompagnatrice (résumé et analyse de ce roman)   sur le site de l’ONPA (Office Niçois des personnes âgées)

Nous vous invitons à visiter ces sites sur Nina Berberova  :