La dame aux camélias

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La dame aux camélias, d’Alexandre Dumas Fils

Résumé de la pièce

Acte 1

Nous sommes dans le boudoir de Marguerite Gautier, une ancienne lingère, de santé fragile, entretenue par le duc de Mauriac. Il y a là Nanine, la servante, et le vicomte de Varville qui attendent Marguerite.

Arrive Marguerite Gautier, qui rentre de l’Opéra et qui demande à Nanine de faire préparer le souper. Ils passent au salon et le vicomte de Varville se met au piano. Marguerite se moque de son obstination : ce dernier a fait livrer un bouquet de roses et de lilas blancs. Marguerite avoue au Vicomte que si son surnom est la Dame aux camélias, c’est justement parce qu’elle n’aime que ces fleurs-là et qu’il est inutile de lui en offrir d’autres.

Entre un joyeux couple : Prudence et Gaston. Ils sont accompagnés d’un homme plus discret : Armand Duval, secrètement amoureux de Marguerite. Prudence et Gaston présentent Armand et apprennent à Marguerite combien Armand s’est inquiété pour sa santé. Marguerite reproche au comte de Varville, son manque d’intérêt. Armand propose alors un toast. Marguerite le remercie et indique qu’elle souhaite danser. Elle demande à Gaston de jouer. Marguerite commence à danser puis s’interrompt, prise soudain par l’une de ses crises de phtisies. Elle demande à rester seule. Armand Duval, toutefois, veut rester avec elle. Il lui déclare alors son amour. Marguerite, malgré son trouble, relativise :

« .. aimez moi comme un bon ami, mais pas autrement. Venez me voir, nous rirons, nous causerons; mais ne vous exagérez pas ce que je vaux, car je ne vaux pas grand chose. Vous avez un bon cœur, vous avez besoin d’être aimé; vous êtes trop jeune et trop sensible pour vivre dans notre monde; aimez une autre femme ou mariez-vous…».

Puis Marguerite offre à Armand un camélia qu’il doit lui rapporter le lendemain « quand il sera fané » dit-elle. Tout le monde rejoint Marguerite et Armand, on boit, on chante, on danse.

Acte II

Armand ayant vu rentrer chez Marguerite Gautier, le Comte de Giray écrit une lettre désespérée à celle qu’il aime :

«… Au moment où je sortais de chez vous, M. le Comte de Giray y entrait… pardonnez moi le seul tort que j’aie, celui de ne pas être millionnaire, et oublions tous les deux que nous nous sommes connus, et qu’un instant nous avons cru nous aimer. Quand vous recevrez cette lettre, j’aurai déjà quitter Paris…»

Marguerite est troublée. Elle hésite. Elle ne souhaite pas se lier à un seul homme, préférant vivre, libre, au jour le jour. Grâce à l’intervention de Prudence, elle accepte de revoir Armand. Après des excuses réciproques, Marguerite avoue son trouble à Armand :

« En une minute, comme une folle, j’ai bâti tout un avenir sur ton amour, j’ai rêvé campagne, pureté; je me suis souvenue de mon enfance; on a toujours eu une enfance, quoi que l’on soit devenue…»

Puis elle le met en garde sur les dangers de cet amour naissant :

« Ne me trompe pas, Armand, songe qu’une émotion violente peut me tuer; rappelle toi bien qui je suis, ce que je suis…»

Acte III

Marguerite s’est réfugiée avec Armand à Auteuil, dans une maison de campagne. Ils y vivent là un grand bonheur. Mais Armand est bouleversé par Prudence, qui lui avoue avoir reçu l’ordre de vendre certaines propriétés pour faire face aux problèmes matériels. Il décide alors de regagner Paris pour éviter cela. Marguerite apparaît à son tour, elle attend un homme d’affaires. Mais c’est le père d’Armand qui se présente. Celui-ci est sévère avec Marguerite. Elle lui avoue son intention de tout vendre pour ne rien devoir à Armand. M. Duval père vient en fait demander un grand sacrifice à Marguerite, celui de renoncer à Armand. En effet cette liaison scandaleuse met en péril le mariage de sa fille. Marguerite qui tout d’abord refuse, finira par accepter. Après le départ de M. Duval père, elle s’apprête à écrire une lettre d’adieu à Armand. L’arrivée soudaine du jeune homme la trouble, elle se jette dans ses bras en pleurant et s’enfuit. Armand ne comprend pas, mais la lettre de Marguerite lui parviendra quelques instants plus tard lui laissant croire qu’elle est entre les bras d’un autre homme.

Acte IV

Nous sommes dans un salon très élégant chez Olympe. Les invités jouent aux cartes, rient et boivent. Marguerite doit venir, en compagnie du Vicomte de Varville. Mais Armand Duval est là aussi. Il n’a qu’un désir : se venger de son ancienne maîtresse. Il joue aux cartes avec le Vicomte et gagne une somme considérable. Marguerite lui demande de l’écouter en aparté. Elle voudrait tout lui avouer, mais se rappelant de la promesse à M. Duval père, elle déclare aimer le Vicomte de Varville. Fou de rage, Armand appelle tous les invités et devant eux, il jette tous les billets qu’il a gagné au visage de Marguerite. Elle pousse un cri et tombe à la renverse. Varville crie son mépris à Armand :  » Décidément, Monsieur, vous êtes un lâche. »

Acte V

Marguerite est au lit chez elle, gravement malade. De plus elle est poursuivie par les huissiers. Elle sait qu’elle n’a plus que quelques heures à vivre. Dehors, les rues de Paris renvoient l’écho des fêtes du Carnaval. Marguerite reçoit uen lettre de M. Duval qui lui annonce que lui et son fils lui demanderont pardon du mal qu’ils lui ont fait. Puis Nanine annonce la bonne nouvelle: la venue d’Armand. Il se confond en excuses :

« C’est moi Marguerite, moi si repentant, si inquiet, si coupable, que je n’osais franchir le seuil de cette porte. Si je n’eusse rencontré Nanine, je serais resté dans la rue à prier et pleurer…».

Marguerite savoure ces retrouvailles et cette réconciliation tardive. A Armand qui s’inquiète de sa pâleur, elle répond :

« … Tu comprends que le bonheur ne rentre pas aussi brusquement dans un cœur désolé depuis longtemps, sans l’oppresser un peu…»

Puis une dernière fois, elle réconforte celui qu’elle va abandonner :

« Comment, c’est moi qui suis forcée de te donner du courage? Voyons obéis, moi. Ouvre ce tiroir, prends-y un médaillon… c’est mon portrait, du temps que j’étais jolie! Je l’avais fait faire pour toi; garde le, il aidera ton souvenir, plus tard…»

Puis elle s’éteint, heureuse. C’est Nichette, agenouillée à son chevet qui lui rendra cet hommage :

« Dors en paix, Marguerite! Il te sera beaucoup pardonné, parce que tu as beaucoup aimé ! « 

Quelques éléments de la biographie d’Alexandre Dumas fils (1824-1895)

Alexandre Dumas fils, est le fils naturel du romancier Alexandre Dumas (1802-1870) et d’une modeste couturière, Catherine-Laure Labay ( 1793-1868). Il est déclaré « enfant naturel » de père et de mère inconnue.

Il fut élevé par sa mère jusqu’à l’âge de sept ans. Le 17 mars 1831, Alexandre Dumas reconnaît son fils. Sa mère le reconnaîtra une semaine plus tard. Après un combat douloureux entre ses parents, c’est finalement son père qui en obtient la garde. Il entre en pension dès l’âge de neuf ans et vit douloureusement son statut de bâtard.

En 1844, il rencontre Marie Duplessis, qui devient sa maîtresse et lui inspirera le personnage de Marguerite Gautier, l’héroïne de la Dame aux camélias.

Il publie en feuilleton son premier roman les Aventures de quatre femmes et d’un perroquet, en 1845, l’année de ses 21 ans.

Il connaît la célébrité grâce à son roman la Dame aux camélias qu’il publie en 1848. Il adaptera lui-même ce récit au théâtre en 1852. Il obtiendra un succès énorme, sans doute un des plus importants du XIXe siècle. L’année suivante, la pièce est adaptée pour l’opéra par Francesco Maria Piave et Giuseppe Verdi sous le titre de la Traviata.

Comme son père, Alexandre Dumas fils a une existence mondaine ruineuse, et il est, lui aussi, un auteur prolifique. Il est très marqué par son statut d’enfant naturel, et il devient l’avocat des « enfants sans parents » et des « filles-mères ». Il est particulièrement attentif aux « sujets de société  » : drames familiaux, prostitution, adultère, divorce, condition féminine… ce qui lui vaudra la réputation « d’auteur à scandales ».

Il est l’auteur d’une dizaine de romans (le Régent Mustel, 1852; Sophie Printems, 1854; l’Affaire Clemenceau, 1866…) et de nombreuses pièces de théâtre (le Demi-Monde, 1855; la Question d’argent, 1857; le Fils naturel, 1858; Un père prodigue, 1859; l’Ami des femmes, 1864; les Idées de Mme Aubray, 1867; la Princesse Georges, 1871; Monsieur Alphonse, 1873; Denise, 1885; Francillon, 1887).

Il est élu à l’Académie française en 1874. Il meurt le 28 Novembre 1895 à Marly le Roi et est enterré au Cimetière Montmartre.

Premiers paragraphes de Préface de la Dame aux camélias

 » Mon avis est qu’on ne peut créer des personnages que lorsque l’on a beaucoup étudié les hommes, comme on ne peut parler une langue qu’à condition de l’avoir sérieusement apprise.
N’ayant pas encore l’âge où l’on invente, je me contente de raconter.
J’engage donc le lecteur à être convaincu de la réalité de cette histoire dont tous les personnages, à l’exception de l’héroïne, vivent encore.
D’ailleurs, il y a à Paris, des témoins de la plupart des faits que je recueille ici, et qui pourraient les confirmer, si mon témoignage ne suffisait pas. Par une circonstance particulière, seul je pouvais les écrire, car seul, j’ai été le confident des derniers détails, sans lesquels, il eût été impossible de faire un récit intéressant et complet. »

La fin du roman

« Je ne tire pas de ce récit la conclusion que toutes les filles comme Marguerite sont capables de faire ce qu’elle a fait.; loin de là, mais j’ai connaissance qu’une d’elles avait éprouvé dans sa vie un amour sérieux, qu’elle en avait souffert et qu’elle en était morte. J’ai raconté au lecteur ce que j’avais appris. C’était un devoir.
Je ne suis pas l’apôtre du vice, mais je me ferai l’écho du malheur noble partout où je l’entendrai prier.
L’histoire de Marguerite est une exception, je le répète; mais si c’eût été une généralité, ce n’eût pas été la peine de l’écrire. « 

Marie Duplessis

C’est la courtisane Marie Duplessis qui a inspiré le personnage de Marguerite Gautier. Marie Duplessis a vécu de 1824 à 1847. Alexandre Dumas Fils a rencontré Marie Duplessis en 1844. Elle a été sa maîtresse jusqu’en 1845. Lorsqu’elle meurt, le 3 février 1847, après trois jours d’agonie, il est à Marseille. Il compose un poème à sa mémoire, qui sera publié la même année dans un recueil de poèmes : Péchés de jeunesse

A propos de la Dame aux camélias par Alexandre Dumas Fils

« La personne qui m’a servi de modèle pour l’héroïne de la Dame aux camélias senommait Alphonsine Plessis, dont elle avait composé le nom plus euphonique et plus relevé de Marie Duplessis. Elle était grande, très mince, noire de cheveux, rose et blanche de visage. Elle avait la tête petite, de longs yeux d’émail comme une Japonaise, mais vifs et fins, les lèvres du rouge des cerises, les plus belles dents du monde; on eut dit une figurine de Saxe. En 1844, lorsque je la vis pour la première fois, elle s’épanouissait dans toute son opulence te sa beauté. Elle mourut en 1847, d’une maladie de poitrine, à l’âge de vingt-trois ans.

Elle fut une des dernières et des seules courtisanes qui eurent du cœur. C’est sans doute pour ce motif qu’elle est morte si jeune. Elle ne manquait ni d’esprit, ni de désintéressement. Elle a fini pauvre dans un appartement somptueux, saisi par ses créanciers. Elle possédait une distinction native, s’habillait avec goût, marchait avec grâce, presque avec noblesse. On la prenait quelquefois pour une femme du monde. Aujourd’hui, on s’y tromperait continuellement. Elle avait été fille de ferme. Théophile Gautier lui consacra quelques lignes d’oraison funèbre, à travers lesquelles on voyait s’évaporer dans le bleu cette aimable petite âme qui devait, comme quelques autres, immortaliser le péché d’amour.

Cependant Marie Duplessis n’a pas eu toutes les aventures pathétiques que je prête à Marguerite Gautier, mais elle ne demandait qu’à les avoir. Si elle n’a rien sacrifié à Armand, c’est qu’Armand ne l’a pas voulu. Elle n’a pu jouer, à son grand regret que le premier et le deuxième acte de la pièce. Elle les recommençait toujours, comme Pénélope, sa toile : seulement c’est le jour que se défaisait ce qu’elle avait commencé la nuit. Elle n’a jamais, non plus, de son vivant, été appelé la Dame aux camélias. Le surnom que j’ai donné à Marguerite est de pure invention. Cependant il est revenu à Marie Duplessis par ricochet, lorsque le roman a paru, un an après sa mort. Si au cimetière Montmartre, vous demandez à voir le tombeau de la Dame aux camélias, le gardien vous conduira à un petit monument carré qui porte sous ces mots : Alphonsine Plessis, une couronne de camélias blancs artificiels, scellée au marbre blanc. Cette tombe a maintenant sa légende. L’art est divin. Il crée ou ressuscite…. »

Texte publié en 1867, 19 ans après la première édition de la Dame aux camélias