Joachim du Bellay

Introduction

dubellay3.jpg (4179 octets)

« Du Bellay est le maître des images nocturnes dans la légèreté du ciel d’Anjou. Il paraît soudain écrasé par le monde, sa froideur et ses ruines; il nous dit comme Musset, ses illusions déçues et comme, Musset, toujours, il se réveille le fouet à la main. Du Bellay est noble : il passe le front penché et le visage baigné de larmes à l’ombre des forêts centenaires et, tout à coup il jette autour de lui des regards irrités. De tous les poètes du XVIème siècle, il est celui qui se tient le plus prêt du mystère et s’en va d’une allure souple et dédaigneuse, vers le lointain rivage où les mortels ordinaires ne pourront jamais aborder. » Kléber Haedens Une Histoire de la Littérature française Grasset 1970

Joachim du Bellay est né au château de La Turmelière, en Anjou, en 1522. Il est originaire d’une famille de cardinaux, de diplomates et de gouverneurs. Orphelin de père et de mère avant qu’il n’ait 10 ans, il est confié à la tutelle de René, son frère aîné. Ce dernier le néglige. Si l’on en croit les propres affirmations de Joachim du Bellay, il a une enfance triste, solitaire à la Turmelière dans le manoir paternel. Il devient un adolescent fragile qui apprend à se recueillir dans la solitude des forêts et à rêver sur les bords de la Loire.

Comme l’évoque Kléber Haedens dans Une Histoire de la Littérature française, il est un jour d’été déterminant dans la vie de du Bellay, celui où, dans une auberge, sur les bords de la Loire, il rencontre Pierre de Ronsard. Celui-ci est fin, élégant, et parle avec aisance. Les deux jeunes hommes ont une vingtaine d’années. Ils ont des parents et amis communs. Après avoir rêvé l’un et l’autre à une carrière militaire, ils ont du renoncer tous deux pour cause de surdité précoce. Pierre de Ronsard écrit des vers et veut devenir un grand poète. Il explique à du Bellay, qu’il rentre à Paris, au collège de Coqueret, où il étudie les auteurs anciens. Joachim avoue qu’il compose des poèmes, lui aussi. Ronsard convainc du Bellay de venir avec lui. Au collège de Coqueret, ils auront Jean Dorat, un brillant helléniste comme professeur. Ronsard et du Bellay forment alors un groupe d’amis, qui prendra en 1549 le nom de Brigade avant d’adopter en 1553 celui de la Pléiade. Ce groupe souhaite définir de nouvelles règles poétiques. Ils décident de publier un manifeste que du Bellay sera chargé d’écrire : La Défense et Illustration de la langue française. Ce livre, animé d’un souffle énergique mais un peu hautain, se veut l’acte de fondation de la poésie française. Aventure courageuse, qu’il mèneront avec intelligence, talent, et aussi ironie.

Puis du Bellay publie un recueil d’une cinquantaine de sonnets, l’Olive. Ces sonnets « à la manière » de Petrarque, connaissent un grand succès.

Malgré des problèmes de santé, du Bellay accompagne son oncle le cardinal Jean du Bellay à Rome pour une mission diplomatique. Cet exil de quatre ans commencera dans l’enthousiasme. Mais Rome qu’il avait tant magnifié dans ses rêves, le décevra. De retour à Paris, en 1558, il publie Les Regrets, un recueil de 191 sonnets (dont le célèbre : « Heureux qui comme Ulysse« ), en alexandrins. Sa santé se détériore. Sourd et malade, il meurt le 1er janvier 1560 à 37 ans.

Biographie

1522 Joachim Du Bellay naît au château de La Turmelière, près de Liré en Anjou. Il est issu d’une famille noble, dont la branche la plus illustre est celle de Langey : Guillaume, seigneur de Langey et futur gouverneur du Piémont, Jean, évêque de Paris (et qui sera cardinal en 1535), René, évêque du Mans, étaient ses oncles. Joachim sera orphelin de père et de mère avant d’avoir 10 ans.
1531 Joachim est confié à la tutelle de René, son frère aîné. Si l’on en croit ses propres affirmations, il a une enfance triste, solitaire à la Turmelière dans le manoir paternel. Il s’est plaint également de ne pas avoir d’activité intellectuelle. Il ne reçoit guère d’enseignement, sauf peut-être celui épisodique je Jacques Michelet, le chapelain des du Bellay.
1540 Il fréquente, vers 1540, le salon de sa parente Louise de Clermont-Tonnerre.
1543 Mort de Guillaume du Bellay, seigneur de Langey.
La légende veut que du Bellay, Ronsard et Peletier du Mans se soient croisés dans la cathédrale où étaient célébrées, par René du Bellay, évêque du Mans, les obsèques de Guillaume
la mort de cet oncle prive Joachim, qui n’a alors que 19 ans, de la carrière des armes. Il songe alors à solliciter le soutien de Jean du Bellay, le cardinal.
1545 Joachim se rend à Poitiers pour poursuivre ses études.
1546 Il fait son droit à Poitiers et rencontre un milieu lettré. Il côtoie Marc Antoine Muret et Salmon Macrin l’initie à la poésie. Il fréquente également Jacques Peletier. Ce dernier influence du Bellay : il lui fait découvrir les lettres antiques et l’initie à la pratique de l’Ode
1547 Joachim du Bellay fait la connaissance de Ronsard. Il se retrouvent quelques mois après au collège de Coqueret à Paris, parmi les élèves du grand helléniste Dorat.
En cette année où mourut François 1er, du Bellay parfait sa connaissance du latin, il découvre sous la férule de Dorat la langue et les auteurs grecs. Il lit également les grands écrivains italiens : Castiglione, Boccace, Petrarque…
Il publie son premier poème : un dizain, en français, intitulé, A la ville du Mans
Ronsard décide de former avec d’autres jeunes poètes — parmi lesquels son ami Joachim du Bellay — un groupe qui prendra en 1549 le nom de Brigade avant d’adopter en 1553 celui de la Pléiade. Ce groupe souhaite définir de nouvelles règles poétiques.
1549 En février, du Bellay publie La Défense et Illustration de la langue française ( La Deffence et Illustration de la langue françoyse, dédiéà un cousin germain de son père, le cardinal René du Bellay), un manifeste qui résume les intentions de la future « Pléiade » : leur objectif est de donner à la langue française le lustre et la grandeur de la langue antique, à la fois par l’imitation des Anciens et des Italiens, et aussi par l’enrichissement de la langue et de son style. La publication de La Défense et Illustration de la langue française marque le début de la carrière de du Bellay
En novembre, du Bellay publie 50 sonnets : Cinquante Sonnetz à la louange de l’Olive, l’Anterotique de la vieille et de la jeune Amye et vers lyriques ( dédiésà la princesse Marguerite, soeur d’Henri II).
Olive serait l’anagramme de Mlle de Viole.
Ces sonnets « à la manière » de Petrarque, constituaient une première en France et connurent un grand succès.
Du Bellay connaît des problèmes de santé; Il est atteint d’une tuberculose pulmonaire.
1550 En raison du succès des Cinquante Sonnetz, publication d’une deuxième édition augmentée ( avec 65 sonnets de plus).
Il connaît des premiers symptômes de surdité.
1551 Il connaît de nombreux soucis : procès, affaires de famille, d’autant plus qu’il devient cette année-là tuteur de son neveu Claude, fils de son propre tuteur, René. Ce tutorat lui vaut d’entrer en procès avec Magdelon de la Roche au sujet d’un terrain, la terre d’Oudon, acquise de façon douteuse par René du Bellay.
Il poursuit sa carrière poétique : participation au Tombeau de Marguerite de valois, Royne de Navarre
1552 Complainte du Désespéré
Traduction de Virgile accompagnée d’autres œuvres, sous le titre Quatrième Livre de l’Enéïde et œuvres de l’invention du translateur
1553 Du Bellay accompagne, comme secrétaire, son oncle, le cardinal Jean du Bellay, auquel Henri II a confié la mission de négocier avec le pape une alliance contre Charles Quint.
Cet exil de quatre ans va commencer dans l’enthousiasme :
 » Je me ferai savant en la philosophie,
En la mathématique et médecine aussi,
Je me ferai légiste, et d’un plus haut souci,
Apprendrai les secrets de la Théologie…« 
Du Bellay passe par Lyon, où il rencontre Pontus du Tyard ( un des compagnons de la Pléiade) et aussi Maurice Scève, un poète qu’il admire.
Avant même son arrivée, du Bellay est fasciné par Rome, cette ville auréolée du prestige des civilisations antiques.
Mais ce pèlerinage se révèle vite un désastre, « un malheur voyage« , et son rêve de carrière s’évanouit en même temps que celui de l’idéal romain. Certes devant les ruines de l’Antique cité, il subit le « choc de l’histoire« , mais il lui faut vite déchanter en côtoyant les romains. Que ce soient les dignitaires, les banquiers, les gens d’Eglise ou le peuple, les romains du seizième siècle n’ont décidément plus la même éthique que leurs ancêtres. L’humaniste qu’il est, est déçu : l’ambition, l’argent, ou la corruption ont balayés les valeurs qu’il recherchait : savoir, respect, mérite, vertu…
Cette immense déception n’altérera pas son travail. Du Bellay travaillera à quatre ouvrages qu’il publiera après son retour en France : les Regrets, les Divers Jeux rustiques, les Antiquités de Rome, et les Poemata.
1557 Après la défaite de Saint-Quentin, le cardinal Jean du Bellay, qui n’est pas parvenu à convaincre Paul IV, doit reconnaître l’échec de sa mission. Joachim du Bellay rentre en France.
1558 Malgré les grandes publications (Les Regrets, les Divers Jeux rustiques, les Antiquités de Rome, et les Poemata) le retour en France fut assombri à la fois par des problèmes de santé (insuffisance pulmonaire) et des soucis financiers.
1559 Du Bellay doit à nouveau se défendre concernant la terre d’Oudon, la terre acquise de façon douteuse par son oncle René du Bellay. L’affaire trouve enfin un arrangement : en échange d’une indemnité, du Bellay renonce aux droits de sa famille sur cette terre. Cet accord va lui permettre de s’affranchir de ses soucis financiers
1560 Du Bellay meurt d’une apoplexie, à sa table de travail dit-on le 1er janvier 1560, à l’âge de 37 ans. Il est inhumé à Paris, en la chapelle de saint-Crépin.
Publication posthume de : Le Discours au roi sur la poésie
1567 Publication posthume de : L’Ample Discours au roy, sur le faict des quatre estats du Royaume de France
1568 Publication des œuvres françoises de Joachim du Bellay.

Source :

Les Grands Ecrivains de la langue française (Edition Robert) et
Les Regrets de Du Bellay (par Judith Chavanne, collection Balise, éditions Nathan)


Oeuvres

1547 A la ville du Mans
1549 La Défense et Illustration de la langue française ( La Deffence et Illustration de la langue françoyse)
Cinquante Sonnetz à la louange de l’Olive, l’Anterotique de la vieille et de la jeune Amye et vers lyriques
1550 Cinquante Sonnetz, publication d’une deuxième édition augmentée
1551 Participation au Tombeau de Marguerite de valois, Royne de Navarre
1552 Complainte du Désespéré
Quatrième Livre de l’Enéïde et œuvres de l’invention du translateur
1558 Les Regrets,
les Divers Jeux rustiques,
les Antiquités de Rome,
les Poemata
1560 Publication posthume de : Le Discours au roi sur la poésie
1567 Publication posthume de : L’Ample Discours au roy, sur le faict des quatre estats du Royaume de France
1568 Publication posthume des œuvres françoises de Joachim du Bellay.

Liens

  • Florilège de du Bellay sur le site du Club des Poètes (Jean-Pierre Rosnay)